vendredi 17 mars 2017

Alexandre Dumas, un auteur à part passionné de mentalisme : chiromancie, hypnose, magnétisme, prestidigitation, art du pickpocket, voyance (troisième partie), L’Art du pickpocket.




Un nouveau livre traduit en français sur l'art du pickpocket.


Pour tout ce qui concerne les rapports d’Alexandre Dumas avec la prestidigitation, l'hypnose, le magnétisme et la voyance, qu’on pourrait rassembler sous le même nom de « mentalisme », je vous renvoie à l’excellent article de Fanch Guillemin dans la Revue de la Prestidigitation n° 613 (mai 2016) : « Alexandre Dumas et la magie ».

En 1865, Alexandre Dumas se rend en Italie accompagné d’Alphonse Esquiros (1812-1876), auteur du livre Le magicien (1837) et d’Adolphe Desbarolles, un grand spécialiste de chiromancie, la lecture des lignes de la main (pour voir un résumé de ses livres et de ses théories, téléchargez cet ouvrage sur Gallica).   

Ils y rencontrent un des plus grands prestidigitateurs italiens de l’époque, Manicardi, aujourd’hui injustement oublié (voir à ce sujet sur le site Virtual Magie  l’article « La magie des années soixante est passée » de Gérard Kunian).

Il est cité comme un grand magicien dans le livre du fameux prestidigitateur Robert-Houdin, paru en 1868, Confidences et révélations, Comment on devient sorcier  : « En province, ce sont Adrien fils, Alberti, Anguinais (Mlle), Bosco fils, Conus fils, Girrood, Lassaigne, Manicardi et plusieurs autres encore dont les noms m’échappent. »

Manicardi eut à partir de 1865 un spectacle à Paris, d’abord rue Coquillière, puis au 10, boulevard Montmartre.

Mais ce qui intéresse Alexandre Dumas, c’est sa maîtrise parfaite dans l’art des pickpockets. Voici un extrait de sa conférence sur l’Italie et Manicardi :

« Il faut que je vous raconte comment je fis la connaissance du célèbre Manicardi, et vous allez voir si nos prestidigitateurs italiens valent en habileté nos prestidigitateurs français. Nous logions dans un petit glacier de la Via Fernando à Naples, attendant l’entrée triomphale de mon illustre ami Giuseppe Garibaldi et de ses chemises rouges, prévue pour le lendemain… 

Non loin de notre table, vint s’asseoir un petit monsieur grêle et sec qui sembla prendre intérêt à notre conversation. Il avait beaucoup remué, beaucoup tourné et s’était levé à différentes reprises.

Soudain, Esquiros voulut se moucher. Il chercha son mouchoir mais l’avait oublié. Desbarolles voulut prendre une prise. Il chercha en vain sa tabatière… Je voulus regarder l’heure ; et bien que j’eusse conscience d’avoir apporté ma montre, je ne la trouvai point non plus ! Nous nous fouillâmes tous : nos porte-monnaie avaient aussi disparu ! Évidemment, un voleur était passé et qui devait se trouver dans le café, car personne n’était sorti depuis notre entrée. Nos soupçons se portèrent sur ce monsieur aux allures suspectes. J’interrogeai le glacier : lui non plus ne le connaissait pas.

Deux agents passaient : il leur fit signe d’entrer. Deux minutes après, ils sommaient notre homme de se fouiller. Celui-ci se défendit énergiquement : il gesticulait, parlait anglais quand on lui causait italien, allemand quand on l’interrogeait en français, si bien que les agents, de plus en plus convaincus, le menacèrent d’user de violence. Il se décida enfin, tout en maugréant, à se laisser faire. Mais cette fouille n’eut aucun résultat ; on ne trouva sur lui rien d’insolite… Les agents italiens, plus polis que les agents français, lui firent des excuses. « Je ne demanderai qu’une seule chose comme réparation, nous dit-il en bon français. J’ai subi un fait outrageant : je demande qu’on le fasse subir à quelqu’un que je soupçonne fort. Alors, veuillez prier messieurs les agents de se fouiller eux-mêmes. »

Les agents, croyant à une mauvaise plaisanterie, semblaient prêts de se fâcher. Quant à nous, nous avions été pris d’un fou rire à cette idée baroque. Mais l’inconnu plongea vivement la main dans la poche de l’un, et en tira deux montres et trois mouchoirs. L’hilarité était à son comble, sauf pour les policiers sur qui on retrouva tous les objets volés, dans les poches ou les bottes. Et l’homme crut devoir alors s’expliquer : « Messieurs, dit-il, je suis prestidigitateur et peut-être aussi un sorcier quoique je ne sente pas le roussi. Cette petite séance a été donnée au profit de monsieur Dumas. Je pars demain pour Paris : voudra-t-il me confier quelques lettres pour ses amis ? Je m’appelle Manicardi. »

L’aventure était plaisante. Les agents, qui n’avaient rien de mieux à faire, restèrent avec nous, et nous passâmes une partie de la nuit à célébrer le talent du célèbre Manicardi… »

Voilà. C’est tout pour aujourd’hui. Amitiés à tous.

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